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samedi 19 janvier 2008

L'université numérique, avec ou sans BU ?


Le professeur Henri Isaac a remis à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche son rapport de mission sur l'université numérique.
Je me suis précipité dessus pour y voir ce qu'il contenait en matière de bibliothèques et de documentation puisque, en éternel optimiste que je suis, je pense que les bibliothécaires ont un rôle essentiel à jouer pour "améliorer la qualité de service pour permettre l'insertion de tous les étudiants dans la société du numérique, afin de faciliter leur réussite dans leur parcours universitaire".

Bon, évidemment je suis plutôt déçu. Les services communs de documentation ne sont pas totalement absents du rapport, mais ils sont loin d'y tenir une place centrale.
Parmi les 9 actions proposées qui constitueraient une politique forte pour arriver à l'objectif affiché d'insérer 100% des étudiants dans la société du numérique figure l'accroissement des ressources numériques disponibles dans les services communs de documentation. Pour y parvenir, le rapport suggère de doubler la dotation moyenne par étudiant sur les ressources numériques pour parvenir à se situer dans la moyenne européenne.
La seule autre mention des bibliothèques dans le rapport concerne leur rôle dans la généralisation de points d'accès gratuits à l'Espace Numérique de Travail pour les étudiants (Heureusement, j'imagine que toutes les BU proposent d'ores et déjà, au moins aux étudiants de leur université, un accès gratuit à postes connectés à Internet).

Si le seul intérêt des S.C.D. dans l'avenir est d'augmenter l'offre de documentation électronique, je connais un moyen simple de dégager le budget nécessaire : supprimer les bibliothèques, confier respectivement à une cellule administrative le soin de signer les contrats - souvent léonins - avec les fournisseurs de documentation électronique et au Centre de Ressources Informatiques de l'université le soin d'organiser techniquement l'accès à ces ressources, via l'E.N.T. ou un site dédié !

Personnellement, je suis persuadé que nous avons un rôle bien plus important que ça à jouer dans le contexte d'une université numérique. Pour cela, nous disposons de deux atouts :
  • Les bibliothécaires sont des professionnels du traitement et de l'analyse de l'information
    Que l'information soit numérique ou pas, elle doit être traitée pour être accessible : sélectionnée, validée, indexée,... Si j'en crois les dossiers dans lesquels nous sommes d'ores et déjà impliqués à Nancy (Indexation de ressources pédagogiques numériques, mise en ligne des thèses et mémoires, dépôt d'archives ouvertes), cette compétence n'est pas méconnue, même si la participation du S.C.D. pourrait parfois intervenir plus en amont dans les projets, voire être plus sollicitée (pour la plate-forme de cours en ligne, par exemple).

  • Les bibliothèques sont des administrations de guichet
    Elles sont largement ouvertes au public, en tout cas beaucoup plus que la majorité des autres services des universités, à part les RU et les résidences du CROUS.
    En-dehors des cours, les étudiants n'ont quasiment comme interlocuteur que les bibliothécaires. Les services administratifs, comme la scolarité, sont également des guichets, mais j'ai souvent eu l'impression que leurs périodes d'ouverture sont très précisément étudiées pour éviter les heures où les étudiants risqueraient de les submerger !
    En tout cas, en-dehors des questions concernant purement l'accès à la documentation, les bibliothèques de notre S.C.D sont le premier interlocuteur des étudiants pour ce qui concerne la gestion de leur Sésame (code pour l'accès aux ressources informatiques de l'université), pour la communication et la formation autour de l'E.N.T. et prochainement pour la première assistance pour l'utilisation de la méthode d'apprentissage de langues en ligne qui va être proposée à l'ensemble des étudiants et du personnel.
    Il me semble que, dans une période où la fréquentation des bibliothèques et les transactions de prêt diminuent, il s'agit d'un aspect de notre travail à ne pas négliger, notamment car il nous permet justement de maintenir le contact avec les étudiants. Dans ce domaine de l'information et de l'assistance auprès des étudiants pour les questions numériques, nous aurions d'ailleurs peut-être intérêt à développer encore et à formaliser les collaborations avec le C.R.I.
Le gros du travail reste bien sûr pour les S.C.D. de s'assurer de disposer des compétences et des moyens pour conserver ces atouts et tenir ce rôle dans l'avenir, le plus difficile étant probablement de réussir à se faire connaître et reconnaître au sein même des universités !

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