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mercredi 3 octobre 2007

C'est comme ça, on n'y peut rien...


La nouvelle a fait le tour de la presse mondiale en septembre, apparemment lancée par une dépêche de l'Associated Press :
Aleksander Kuzmin, le jeune maire de Megion, qui n'a pas l'air d'être un plaisantin, a interdit à ses fonctionnaires d'utiliser 26 expressions, du style "Je ne sais pas", "Il n'y a pas assez de crédits", "J'étais en vacances" ou "C'est l'heure de ma pause repas". Pour être sûr de bien se faire comprendre, il a fait encadrer et afficher cette liste aux abords de son bureau.
La directrice du personnel explique que cette mesure a amélioré la discipline et surtout l'efficacité : "Avant, c'était très facile de dire 'Je ne sais pas'. Maintenant, avant de présenter un dossier au maire nous préparons plusieurs propositions pour résoudre tel ou tel problème."

La première fois que je suis tombé sur cette info, je l'ai lue rapidement et j'ai tout de suite pensé - à tort - que les instructions s'adressaient aux fonctionnaires chargés de l'accueil du public et, évidemment, j'ai aussitôt cherché à faire le parallèle avec l'accueil du public en bibliothèque.
En plus des excuses typiques de fonctionnaires, quelles sont les excuses spécifiques que les bibliothécaires devraient absolument éviter de débiter à leurs usagers ?
La liste est probablement longue, et les commentaires sont ouverts pour vos propositions. Personnellement, il y en a une que j'aimerais voir bannie :
"Je ne peux pas vous réserver ce document car il est disponible et notre logiciel n'autorise les réservations que pour les documents empruntés."
La première fois que j'ai été confronté à ce cas pratique, c'était à Chambéry, dans le cadre d'un stage de l'ENSSIB et le raisonnement était tellement tordu pour un néophyte qu'il m'a fallu un moment avant d'en démêler l'écheveau :
- Réserver un document déjà emprunté c'est simple : quand le document rentre, le logiciel me signale qu'il est réservé, il lance automatiquement une alerte à la personne qui a fait la réservation et moi, bibliothécaire, je n'ai qu'à ranger le livre sur une étagère spéciale près de la banque de prêt.
- Réserver un document mentionné comme disponible dans le catalogue, c'est TRES compliqué parce que le logiciel ne peut pas tout faire tout seul : il doit alerter le personnel qu'il y a une demande de réservation, ensuite quelqu'un doit se déplacer dans les rayons pour récupérer le document et le mettre sur l'étagère des réservations près de la banque de prêt, puis enfin il faut confirmer au lecteur sa réservation (si on n'a pas trouvé le document censé être disponible, il faut l'annuler) ! Quel boulot, tout ça pour faciliter la vie à un lecteur qui veut être sûr que le document sera toujours disponible s'il se déplace pour venir l'emprunter !
Voilà pourquoi une majorité des bibliothèques ne propose de réservation que sur les documents empruntés, et on comprendra bien qu'il est quasiment impossible d'expliquer à un non-bibliothécaire pourquoi il est plus difficile de réserver un document disponible qu'un document emprunté !
Avant qu'on me pose la question, j'y réponds, d'un ton triste :
A Nancy, si on a réussi à s'identifier dans le catalogue (fonctionnalité encore en voie de mise en production, dans les faits), on peut tout à fait réserver un document emprunté. Par contre, quand on veut réserver un document disponible, voilà le message qu'on obtient, sans plus de précision :

Maintenant, vous savez tous pourquoi ce titre ne peut pas être réservé (encore que, dans les faits, si quelqu'un téléphone on accepte généralement de lui réserver "manuellement" un document disponible), mais si jamais je dois un jour prochain expliquer à un lecteur pourquoi le titre ne peut pas être réservé, je répondrai tout simplement que c'est parce que nous ne sommes pas bons !

16 commentaires:

Anonyme a dit…

Rectification : les prestataires de service ne sont pas bons !
Signé : Une bibliothécaire agacée par son prestataire !

JC Brochard a dit…

Certes, le plus difficile c'est souvent de réussir à faire faire aux prestataires ce qu'ils se sont engagés à réaliser en répondant à l'appel d'offre, mais dans ce cas précis, les logiciels font plutôt bien ce qu'on leur demande, il suffirait de programmer en complément une réservation de document disponible sous réserve de validation par la bibliothèque, mais la résistance viendrait plutôt des équipes qui hésitent à mettre en place une organisation plus lourde et plus gourmande en personnel...

Anonyme a dit…

A la BDP du Haut-Rhin, notre SIGB permet de faire une réservation sur une notice quand un ou plusieurs exemplaires sont disponibles. Ensuite plusieurs fois par semaine, la liste de réservation est imprimé pour une recherche en magasin.

En effet dans un bibliobus de prêt direct, il n'y a que 3000 documents. Ce qui nous permet d'accepter tout type de réservation et d'offrir tout notre fonds aux usagers. C'est gourmand en temps de travail mais nous avons rationalisé en regroupant la recherche de réservation.

La question à se poser est faut-il passer une demi-heure à parfaire sa notice UNIMARC ou à cherche plusieurs documents pour satisfaire nos usagers?

JC Brochard a dit…

Xavier,
Je suppose que la réponse à cette question est la même pour toi comme pour moi : une notice correcte qui coûte le moins de temps possible et du temps consacré aux usagers.
Bien sûr, l'objectif de ce blog est que la réponse à cette question devienne évidente pour tout le monde...!

nescio a dit…

Hum hum, au risque de passer pour le mauvais coucheur de service : pq le lecteur voudrait-il réserver un bouquin disponible? pourquoi ne peut-il tout simplement l'emprunter le jour même? Pourquoi priverais-je d'autre lecteurs intéressés par le même livre au prétexte qu'un lecteur avait envie de le lire, mais pas le temps sur le moment même et qu'il l'a réservé pour son prochain passage à la bib? Dans 'service public', il y a certes 'service' ,mais il y a aussi 'public'...ce qui englobe TOUS les usagers. Premier arrivé, premier servi!
Quant aux réservations par téléphone : il s'agit +tôt à mon sens de 'mettre de côté' un ouvrage qu'une personne s'engage à venir chercher le jour même (une lecture scolaire obligatoire par ex.)...sans quoi, le lendemain, il retourne dans les rayons.

JC Brochard a dit…

Nescio,
S'il y a un message dans ce billet, c'est pourquoi ne traiterait-on pas les demandes de réservation de documents disponibles de la même façon que l'on traite les demandes de réservation de documents empruntés ?
Il me semble que de très nombreuses bibliothèques ont mis en place une réservation de documents empruntés sans se poser trop de questions uniquement parce que ça pouvait se gérer au sein du logiciel et parce que les prestatataires le proposaient.
Pourtant, si on reprend ta liste de questions, elles pourraient toutes s'appliquer à la réservation de documents empruntés :
- Pourquoi le lecteur voudrait-il réserver un bouquin emprunté ?
- Pourquoi ne peut-il tout simplement l'emprunter quand il sera disponible ?
- Pourquoi priverais-je d'autre lecteurs intéressés par le même livre au prétexte qu'un lecteur avait envie de le lire, mais qu'il n'était pas disponible sur le moment même et qu'il l'a réservé pour son prochain passage à la bib quand le document serait rendu ?
Pour ce qui est du "Premier arrivé, premier servi !", c'est aussi valable pour la réservation de documents empruntés et ça n'empêche pas de rendre un service particulier au lecteur qui exprime un intérêt pour un document.
Il me semble que dans toutes les bibliothèques, qu'il s'agisse de réservation de document emprunté, de réservation de document disponible ou de "mise de côté", le délai de réservation est toujours limité...

nescio a dit…

Une vision 'de l'autre côté du comptoir' que j'admire. Bravo. Néanmoins, tu ne réponds pas à mes questions.
Mais je réponds aux tiennes:
1/ pour être sûr de ne pas devoir attendre des mois avant de le trouver sur les présentoirs.
2/ because actualité littéraire, travail scolaire par ex.
3/ tous les lecteurs savent qu'ils peuvent réserver un titre : s'ils le veulent réellement, +tôt que d'attendre de le trouver sur les présentoirs, ils peuvent réserver eux aussi. Et là, il n'y a pas de favoritisme.

Je ne cautionne absolument pas ce système, ce mode de pensée même, je ne peux que constater que bcp de lecteurs aiment lire les nouveautés à leur parution. Ceux-là connaissent le système et en usent. Mais je ne peux m'empêcher de trouver leur démarche plus positive, plus volontaire que celle de ceux qui voudraient réserver un bouquin qu'ils ont sous les yeux et qu'ils pourraient emprunter illico. Il y a là une certaine nonchalance propre selon moi au usagers qui pensent que tout leur est dû.
Je persiste à croire que le système de la réservation limitée aux titres empruntés reste le plus égalitaire pour les usagers.

JC Brochard a dit…

Nescio,
(J'avais parcouru ton profil Blogger trop vite l'autre fois et j'avais raté la confirmation que ton pseudo est bien en référence aux Nits, un groupe dont je suis très fan !)
Les commentaires en décalé ne sont pas des plus pratiques pour débattre et expliquer des nuances d'opinion, mais il me semble que nous avons en tête des situations différentes pour la réservation de document disponible.
Moi je pense principalement à quelqu'un qui fait une recherche sur le catalogue à distance, trouve un document intéressant disponible et le réserve pour pouvoir l'emprunter à sa prochaine visite à la bibliothèque.
Toi, j'ai l'impression que tu fais référence à quelqu'un qui, étant sur place, choisirait de faire mettre un ou plusieurs documents de côté plutôt que de les emprunter, par exemple parce que son quota d'emprunts de documents est atteint. C'est vrai que là ça me paraitrait égoïste et exagéré, mais ce n'est pas cette situation que j'envisageais...

nescio a dit…

...et effectivement, je n'avais pas vu cet aspect-là non plus. Il est vrai que la catalogue de ma modeste bib n'est pas en ligne et donc, cette possibilité de réserver un doc 'à distance' ne m'est jamais venue à l'esprit. Mais ce serait sans doute un service très intéressant à mettre en place. Et se retrancher derrière des 'impossibilités techniques' serait bien peu glorieux...
Longue vie aux Nits donc!

Anonyme a dit…

Absolument.
On doit pouvoir réserver un document emprunté ou non, surtout si c'est à distance, mais pas seulement, et que le logiciel gère la chose ou pas.
Ce qui n'est pas géré automatiquement l'est manuellement, c'est l'évidence même.
Merci à Bibliothèque = Public pour avoir abordé la question.

Anonyme a dit…

Considérant également qu'il n'y a pas lieu de "faire de la réservation à 2 vitesses", je travaille actuellement avec "nos" développeurs maison sur un très prochain (décembre 2007) service de réservation à distance qui permettra à l'usager du réseau (SAN Ouest Provence, 7 équipement, 250 000 documents, 20 000 adhérents) de réserver un document emprunté comme disponible sur n'importe quel point du réseau et de choisir son site de retrait, lequel retrait sera possible immédiatement (après un message de confirmation du bibliothécaire) pour un document en rayon sur le site correspondant au lieu de retrait du réservant et en 24 heures pour un doc en rayon mais nécessitant un transfert intersite.
Alors comment peut-on développer un tel service par nous-même ? C'est simple, c'est du libre et cela s'appelle KOHA.
Et, croyez-moi, c'est vraiment exaltant !

Jérôme Pouchol

JC Brochard a dit…

Dominique,
Merci pour ces encouragements.

Jérôme,
Nous suivons de près à Nancy vos initiatives, et d'autres dans le domaine du libre, en espérant pouvoir en mettre certaines en application chez nous dès que possible...

Pitseleh a dit…

Petit souci de la "réservation en ligne d'un document indiqué disponible" : l'obligation de disposer d'un logiciel prévenant immédiatement le personnel pour que le document soit mis de côté dans la minute. En espérant bien évidemment que le document concerné n'ait pas été déplacé ou ne se trouve pas déjà entre les mains d'un autre usager encore présent dans la structure ("Désolé, veuillez me rendre ce livre. Oui, celui là, quelqu'un l'a réservé de chez lui et passera dans la semaine pour le prendre").

De notre coté nous compensons cette "impossibilité" par la mise de côté par téléphone, ce qui oblige évidemment l'usager intéressé à décrocher son combiné pour nous joindre. Dur dur.

JC Brochard a dit…

Pitseleh,
Pour contourner le problème que tu évoques, dans la solution que je propose (je ne sais pas si le paramétrage actuel des SIGB le permet, mais logiquement ça me semble possible), le lecteur fait une demande de réservation de document disponible. Celle-ci n'est validée dans le SIGB par les bibliothécaires (avec alerte automatique au lecteur par email, sms, pigeon voyageur ou toute autre technologie disponible) que lorsque le document a été effectivement trouvé et mis de côté...
Ca n'empêche pas que la demande de réservation par téléphone est un moyen efficace et simple pour gérer ce genre de demande, mais seulement aux heures d'ouverture avec suffisamment de personnel disponible.

Pitseleh a dit…

Dans ce cas oui, pourquoi pas.

Yvonnic a dit…

Je crois qu'il est peu facile de passer aussi rapidement sur les différences qui existent au niveau des prestataires de service sur ce sujet, et d'une façon générale sur la qualité des OPAC. Elles deviennent d'ailleurs de plus en plus intolérables. Particulièrement les "promesses" d'évolution faites au moment des marchés et non tenues sur la durée.

Enfin toutes ces questions posent le problème du developpement des services à distance. Nous avons beau chercher à les promouvoir, le lecteur comprend très vite les limites du système, ou sa complexité. Et abandonne assez vite... Enfin tout cela crée une fracture entre les lecteurs "qui pigent le truc" et les autres. Dans le cadre d'un réseau j'ai pu constater que pratiquement AUCUN lecteur n'avait compris qu'il pouvait tout de même réserver un document dont l'exemplaire était emprunté (et à condition de cliquer sur le bon exemplaire). La question étant ensuite de lui faire admettre que l'exemplaire en question se situant dans une autre structure, il lui faudrait tout de même se déplacer pour aller le chercher (et l'y ramener). C'est une autre question mais pour le lecteur tout participe de la même logique : à quoi me sert "d'avoir le possibilité de" si cela ne fonctionne pas de bout en bout ?

La question de la logique des services à distance de type réservation pose aussi la question de la fréquentation, et la finalité même de ce que nous proposons. Premier arrivé, premier servi ? Je suis d'accord en tous cas pour préserver un choix maximal pour les lecteurs qui font l'effort de venir régulièrement dans leur structure de proximité.

Par ailleurs les réservations d'ouvrages, en BM, portent souvent sur les mêmes titres, nouveautés et autres incontournables : Que faire ? Les exclure des résas pour un temps donné ? Laisser une liste de réservation s'accumuler sur un titre et courir le risque que le titre soit régulièrement absent des présentoirs, en transit (ou immobilisé en attente de transit !) au risque de donner une "vitrine" assez médiocre du service ? Un livre peut ainsi passer PLUSIEURS MOIS totalement invisible des publics fréquentants!

Par ailleurs, si le système est trop lourd,ou le SIGB mauvais, faire les choses manuellement, outre la lourdeur pour les personnels, (mails, telephone, relayer la résa sur le réseau, la relayer sur la BDP ...), nous fait courir le risque d'avoir des comportements un peu "à la tête du client" (je rends service à Mme Untel)ou qui pourraient être perçus comme tels.


Cette étude reste passionnante et les questions qu'elle pose aussi. Mais on y voit déja une particularité de dégager, bien connue par ailleurs, mais cette fois mise en évidence : les publics étudiants le le "tout public" n'ont pas tout à fait les mêmes attentes (notamment le type d'ouvrages réservés et la maîtrise des opacs).

Ce qui ne veut pas dire pour autant que des moyens différents devraient leur être proposés à priori. Simplement nos stratégies devront être différentes. Comme elle le sont déja entre les petites et grosses BM, entre les BM et les Réseaux etc...

Etant actuellement en plein dans ces questions, d'une façon très concrête, je suis de plus en plus inquiet de la distorsion entre nos stratégies, logistiques et moyens, et la façon dont le public les utilise et les perçoit.

Bravo pour avoir soulevé ce débat!